Tu connais probablement l’obsolescence programmée : c’est la limitation volontaire du fabricant de la durée de vie de son produit pour augmenter la fréquence de remplacement. C’est une stratégie tellement utilisée qu’elle est presque vue comme une norme.
C’est un peu la même chose avec la tolérance aux délais : elle se réduit comme une peau de chagrin et fait l’objet d’un intense marketing. Pourtant, tolérer les délais, et les récompenses est un apprentissage important chez un enfant. Combien de fois tente-t-il d’interrompre son parent parce qu’il veut son attention tout de suite pour des peccadilles? Tolérer les délais est un véritable entraînement sans relâche. Progressivement, l’enfant réussit à accepter le délai entre son désir, son action et le résultat. Il apprend à tolérer l’attente, une situation possiblement anxieuse.
L’univers virtuel dans lequel tu baignes a des délais très courts. Avec la puissance des ordinateurs, tu as accès à une multitude de stimuli qui peuvent activer tes circuits de récompense internes…rapidement. Tu désapprends la tolérance des délais. Tu crois que la norme est la récompense rapide, comme la norme de l’obsolescence programmée.
En quoi c’est problématique? Ce désapprentissage peut jouer sur ta motivation pour mener à terme un projet ou un parcours scolaire. Cela peut jouer aussi sur ton estime de toi parce que tu peux penser que l’absence de récompense immédiate est liée à quelque chose que tu ne fais pas correctement alors que le temps doit faire son œuvre. Cela peut même se transposer dans ta perception de la sexualité. Ultimement, ce désapprentissage programmé est un obstacle à l’acceptation de pensées ou d’émotions que tu vis dans l’instant présent.
Puisque tu as de la difficulté à accepter ce qui se passe, tu t’occupes avec des trucs pouvant activer tes circuits de récompenses. Tu deviens une proie facile aux vendeurs de mirage qui te promettent le bonheur éternel instantané.
Parce que tolérer le délai de la récompense, c’est devenir plus FORT.
Ray